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PMA : la famille dans tous ses états

Aujourd’hui s’ouvraient les états généraux de la bioéthique. Levée de l’anonymat des donneurs de gamètes, ouverture de la PMA aux couples homosexuels et aux célibataires, et naturellement gestation pour autrui (GPA) seront les grands enjeux de ces états généraux.
Amandine, le premier bébé éprouvette né en France le 24 juin 1982 fait déjà partie de l’histoire de la médecine. En moins de quatre décennies, les progrès fulgurants accomplis par les PMA ont mis sans-dessus dessous le vieil ordre de la parenté. Il faut dire que les possibilités offertes aujourd’hui par la PMA ont de quoi faire tourner la tête. Les techniques de PMA offrent aujourd’hui une gamme de réponses extraordinairement variées au problème de la stérilité : insémination artificielle, don d’ovule, prêt ou location d’utérus, congélation d’embryons, fécondation in vitro, avec des spermatozoïdes provenant du mari ou d’un autre homme, un ovule provenant de l’épouse ou d’une autre femme. Un enfant aujourd’hui peut être issu d’un grand nombre de combinaisons. À la plus normale, celle d’avoir un père et une mère, s’ajoutent les possibilités d’avoir deux mères et un père, deux mères et deux pères, trois mères et un père et même trois mères et deux pères quand le géniteur est différent du père et quand trois femmes interviennent : celle qui donne son ovule, celle qui prête son utérus, et celle qui sera la mère légale de l’enfant.
Avec l’ouverture de la PMA aux couples homosexuels ou aux célibataires, ce n’est plus seulement l’ordre de la parenté qui est bouleversé mais aussi nos représentations traditionnelles de la famille. Représentations qui ne sont en réalité pas aussi anciennes qu’on pourrait le croire, car elles pérennisent le modèle de la famille bourgeoise, apparu au XIXe siècle.
On trouve chez Lévi-Strauss de savoureux récits qui montrent que les sociétés primitives ont expérimenté à leurs façons toutes les possibilités que nous offrent aujourd’hui la PMA. Naturellement ces sociétés ne disposaient pas des techniques modernes de fécondation in vitro, de prélèvement d’ovule ou d’embryon, de transfert, d’implantation et de congélation. Mais elles ont imaginé des formules qui offrent autant d’images anticipées et métaphoriques que celles offertes par nos techniques actuelles qui nous posent tant de problèmes juridiques et psychologiques.
Voici quelques exemples rapportés par Lévi-Strauss. L’insémination avec donneur a son équivalent en Afrique, chez les Samo du Burkina Faso. Dans cette société, chaque fillette est mariée de très bonne heure, mais avant d’aller vivre chez son époux, elle doit, pendant trois ans ou plus, avoir un amant de son choix et officiellement reconnu pour tel. Elle apporte à son mari le premier enfant né des œuvres de son amant et garant de sa fécondité. Celui-ci est considéré comme le premier né de l’union légitime.
Un homme dont la femme est stérile peut aussi, moyennant paiement s’entendre avec une femme féconde pour qu’elle lui procure un enfant. En ce cas le mari est donneur inséminateur, et loue le ventre de cette femme.
Chez les Yoruba du Nigéria, des femmes riches peuvent acquérir des épouses auxquels elles demandent d’avoir rapports avec un homme. Quand les enfants naissent, la femme « époux légal », se les approprie moyennant paiement. Ainsi ces couples de deux femmes, que nous appellerions homosexuels, pratiquent la PMA pour avoir des enfants, dont une des femmes sera le père légal et l’autre la mère biologique.
Pour conclure, nihil novi sub sole !

Laurent Vercoustre

2 Commentaires

  1. Bonjour , votre Tribune m’a fait réfléchir sur le droit à l’enfant , le désir d’enfant , le droit de l’enfant et l’éducation de l’enfant
    Nos anciens et certaines ethnies actuelles ne s’embarassaient pas de considérations juridico ethiques et les problèmes n’étaient pas insurmontables..le débat de cette année nous permettra de savoir si les états généraux de la bioéthique.vont aller dans le bon sens de l’évolution de la société de la conception et de l’éducation de la personnalité de l’enfant ? car c’est de cela qu’il s’agit. Je rappelle qu’en dehors des possibillités multiples de la science médicale de la reproduction il faudrait que la décision soit encadrée par la réflexion  » le droit à l’enfant doit il primer sur le droit de l’enfant « ?

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