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Le péril glucidique

Souvenir d’un petit déjeuner à l’hôtel. Quinquagénaire à la mine joviale avec un léger embonpoint,  il revient du buffet avec un plateau bien garni et s’installe à la table voisine. Je promène un regard affligé sur les mets qui composent son petit déjeuner, œufs brouillés, tranche de lard, saucisses, fromage. Comment peut-on commencer ainsi sa journée avec du salé et autant de graisses ? Que d’entorses à la diététique pensais-je tout en me dirigeant à mon tour vers le buffet,  mon petit déjeuner sera beaucoup plus léger, quelques toasts avec de la confiture, une viennoiserie,  peut-être un yaourt aux fruits et naturellement un jus d’orange. C’était il y a une dizaine d’années. je sais maintenant que « mon voisin avait tout bon et moi tout faux !».

Honteuse ignorance, ignorance qui n’est plus concevable à l’heure où des vidéos font  sur le net des recommandations sur le petit déjeuner  à partir de 50 ans une exigence de santé publique. « Il est temps de sonner l’alarme, consommer un petit déjeuner sain est une urgence de santé public »

Est-ce une impression, est-ce une réalité, il se passe quelque chose ?… Dans les médias le discours sur le péril glucidique  tient du pilonnage. La guerre contre les glucides aurait-elle commencé. ? Notre pire ennemis n’est plus le cholestérol mais le pic d’insuline ! Le livre de Jessie Inchauspe Glucose Révolution est un succès mondial. Cette femme biochimiste nous fait partager toutes les ruses qu’elle a mises au point pour lisser le pic d’insuline.

Il faut dire que l’ascension du nombre de diabétique sur la planète a des allures de tsunami : plus de 1,3 milliard de malades sont attendus en 2050. La revue scientifique britannique The Lancet nous avertit : « Le monde n’a pas compris la nature sociale du diabète et a sous-estimé son échelle véritable et la menace qu’il pose » Les chiffres de l’Institut international du diabète (IID), montrent en effet une incessante ascension : de 110 millions en 1994, ils ne sont pas loin de tripler en 2025 atteignant 300 millions. Pour le Lancet « Le diabète est une maladie déterminante du XXIe siècle. » Cette augmentation touche d’abord l’Europe et les États-Unis, mais le phénomène est planétaire et l’Afrique et l’Asie voient leur nombre de diabétiques augmenter tout aussi rapidement. Dans l’intervalle, de 1994 à 2010 l’Afrique aura connu une augmentation de plus de 55 % du nombre de ses diabétiques. L’Asie, elle, comptera près de 46 % de hausse. Selon les modèles élaborés par les experts du Global Burden of disease [1] la prévalence du diabète est passé de 3,2 % en 1990 à 6,2 % en  2021 et devrait atteindre 9,8% en 2050.

Le péril glucidique ne s’arrête pas au diabète de type 2 .Il est considérablement majoré par un autre syndrome, le syndrome métabolique. Curieux syndrome, ce syndrome est en effet constitué par des signes relevant de domaines très différents. Les cinq signes qui le définissent sont : un périmètre abdominal augmenté, une hypertension artérielle, une glycémie supérieure à la normale, l’élévation de triglycérides et l’abaissement du HDL cholestérol. Ces signes apparaissent comme solidaires et révèlent une entité nosologique bien réelle. Quatre d’entre eux sont l’expression d’un hyperinsulinisme, ce sont le périmètre abdominal, l’hypertension artérielle, l’augmentation de la glycémie  et des triglycérides. La diminution du HDL cholestérol est dûe à une diminution de la consommation de graisses animales saturées ou insaturées et également à une activité physique diminuée. Que les diabétologues me pardonnent si  cette descriptions du syndrome métabolique n’est pas parfaitement  exacte. En réalité je voudrais surtout souligner  à propos de ce syndrome métabolique deux choses d’une importance considérable. D’abord sa fréquence très élevée. Il touche cinquante millions d’américains soit un quart des sujets américains adultes. Les spécialistes considèrent qu’il atteint 20% de la population des pays occidentaux, chiffre exorbitant ! Deuxièmement  ce syndrome métabolique fait le lit de nombreuses pathologies, les cancers  à hauteur de au moins  30% mais peut-être même 70% sont liés à l’hyperinsulinisme. Le diabète de type II bien sûr,  le syndrome des ovaires polykystiques et même la maladie d’Alzheimer qualifiée de diabète  de type III par certains.

Nous sommes  les victimes d’une maladie de civilisation liée à la consommation de glucides doublée par la sédentarité. Certes  il y a eu la vague du Covid, pourtant, aussi meurtrières qu’ait été cette vague elle reste un phénomène éphémère.

Le diabète est profondément intriqué avec bien des aspects de notre façon de vivre. S’attaquer aux sucres signifie s’attaquer à l’industrie agro-alimentaire et bouleverser des habitudes profondément enracinées. Ces maladies civilisationnelles sont à l’ évidence étroitement liés à l’histoire de l’humanité. Alors examinons cette histoire. Celle qui nous intéresse ici nous est racontée par Cristin Kearns — chercheuse en santé publique. Cette femme a exhumé un dossier classé que l’industrie sucrière tentait d’enterrer depuis 1967. Ce qu’elle découvre : trois figures respectées de la Harvard school of Public Health— Frederick J. Stare, D. Mark Hegsted et Robert McGandy — ont été achetées par la Fondation du Sucre. Leur mission ? Falsifier les conclusions d’une étude clé sur les causes de l’obésité et des maladies cardiovasculaires.

Chacun reçoit 50 000 $ de pots de vin pour affirmer ceci :  « C’est le gras qui est responsable de votre prise de poids et de vos complications, pas les  sucres. » Et le monde entier a entériné ce mensonge – convaincu du bien-fondé des conclusions d’Harvard – l’une des universités les plus prestigieuses du monde. Un mensonge soigneusement orchestré aux conséquences catastrophiques. Cette étude a influencé des décennies de recommandations officielles. Des millions de médecins ont sans doute été induits en erreur. Et le sucre, lui, a été blanchi. Résultat ? Une explosion de produits “0% matière grasse” aux étiquettes rassurantes, mais contenant d’énormes quantités de sucre. Toute cette histoire Cristin Kearn la présente dans une imposante étude publiée dans le JAMA international medicine sous le titre L’industrie sucrière et la recherche sur les maladies coronariennes. Une analyse historique des documents internes de l’industrie.

Ce sont ces théories erronées qui vont promouvoir le LDL-cholestérol, qui va être considéré comme le principal responsable des maladies cardiovasculaires. Celles-ci sont en contradiction avec la biologie évolutionniste qui montre que  le LDL cholestérol est présent chez de nombreux animaux y compris les insectes, ce qui en biologie évolutionniste est un témoignage fort d’un maillon extrêmement important, tellement important qu’il n’a jamais été remplacé. l’évolution ayant tendance à sélectionner des améliorations. Le LDL cholestérol apparaît donc clairement comme une molécule fondamentale du vivant. On voit donc que faire du cholestérol le principal agent des maladies cardiovasculaires a eu deux tragiques conséquences, celle d’infliger à des millions d’individus  un traitement par les statines, traitement non fondé, puisque faire baisser le cholestérol n’a pas de sens, celui-ci n’étant pas impliqué dans les maladies cardiovasculaires, statines responsables par ailleurs d’une impressionnante liste d’effets secondaires, parmi lesquels le diabète qui affecte 5% des patients sous statines, la seconde plus redoutable encore est d’avoir promu un panier alimentaire où les glucides ont une place prédominante et où les graisses sont bannies, colossale méprise dont le coût en santé pour les pays occidentaux  est exorbitant.


[1] Le Global Burden of Disease (GBD) fournit un outil permettant de quantifier les pertes de santé dues à des centaines de maladies, de blessures et de facteurs de risque. Recueillies et analysées par un consortium de plus de 3 600 chercheurs dans plus de 145 pays, les données compilent les décès prématurés et les invalidités de plus de 350 maladies et blessures dans 195 pays, par âge et sexe, de 1990 à aujourd’hui, permettant des comparaisons dans le temps, entre groupes d’âge et entre populations. 

Laurent Vercoustre

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